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BANA CONGO
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14 janvier 2007

GIZENGA NE RASSURE PAS

Gouvernement éléphantesque

Par  Le Potentiel

La taille annoncée du futur gouvernement Gizenga préoccupe tous les observateurs. Ce qui choque, c’est plutôt l’insouciance de Gizenga lui-même. En effet, son porte-parole a déconcerté l’opinion en banalisant la question. Et en soutenant, dans le dernier communiqué remis à la presse, que le gigantisme de l’Exécutif répond aux considérations politiciennes. Mauvais signe.

Le premier gouvernement de la 3ème République est attendu dans les tout prochains jours. Selon le porte-parole du Premier ministre, Antoine Gizenga, «le Président de la République, le Premier ministre et les membres de la coalition majoritaire sont à pied d’œuvre pour que le Gouvernement, attendu par tous, voit le jour dans un délai tout à fait raisonnable». La nouvelle est intéressante à la seule condition que ce «délai raisonnable» ne soit pas élastique.

Cependant, la réaction du cabinet du Premier ministre surprend tous les observateurs avertis des grandes questions politiques lorsqu’elle balaie d’un revers de la main toutes les observations pertinentes liées à la mise en place d’un gouvernement éléphantesque.

D’après son porte-parole, Godefroid Mayobo, cette taille «tient compte, non seulement des considérations liées à la nature du Gouvernement à former, mais aussi de la volonté partagée du Président de la République, du Premier ministre et des membres de la coalition de voir tous les secteurs importants de la vie nationale bénéficier de l’attention politique nécessaire et au plus haut niveau».

Et de poursuivre, comme pour répondre aux interrogations de l’opinion : «l’engagement est pris pour que le gouvernement ne puisse vivre au-dessus des moyens de la République, ni au détriment des intérêts du peuple». Cherchant l’argumentaire, le porte-parole se noie dans des comparaisons : «La taille d’un gouvernement seule ne peut signifier un coût de fonctionnement excessif, affirme-t-il. Car un gouvernement avec peu de membres peut être plus dépensier qu’un autre avec plus de membres». Un oscar de sophisme conviendrait bien au politicien congolais.

Que cette réaction dangereuse émane du cabinet du Premier ministre Gizenga, crédité pourtant d’un soutien mythique populaire, voilà qui ne rassure pas les Congolais, au premier rang desquels ses propres électeurs.

LA DYNAMIQUE DU GROUPE

Quotidien d’avant-garde, Le Potentiel ne prétend nullement mettre en doute la volonté du Président de la République, du Premier ministre ou des membres de coalition «de voir tous les secteurs de la vie nationale bénéficier d’une attention soutenue au sommet de l’Etat». Mais cela ne lui interdit pas de réfléchir, d’anticiper, d’alerter l’autorité, sur les conséquences pas toujours heureuses d’une telle entreprise : mettre en place un gouvernement éléphantesque. Sans objectif autre que de satisfaire les appétits des copains.

En effet, il est un principe universel, celui de la dynamique du groupe, qui énonce que, plus un groupe est restreint, plus il y a moyen d’exercer un contrôle efficace. Mais plus il est élargi, plus il y a risque de dispersion d’efforts physiques et financiers. Partant, son inefficacité est garantie. Par ailleurs, à l’analyse du communiqué du cabinet du Premier ministre, on se demande comment un petit groupe peut-il être plus dépensier que ne le serait un plus grand. C’est à n’y rien comprendre. Si tel est le cas, ce serait purement et simplement de la mauvaise gouvernance, tant il est vrai que les dépenses engagées par un petit groupe ne peuvent nullement dépasser celles du fonctionnement d’un grand groupe.

Dans le cas d’espèce, la question de la taille du gouvernement relève du bon sens. La République démocratique du Congo, c’est connu, est exsangue. On ne peut donc imposer à un tel pays un rythme accéléré des dépenses considérables – abusivement qualifiées de dépenses de souveraineté – rien que pour payer les membres d’un cabinet mammouth. Ce serait de l’inconscience. Et il n’est pas exclu d’entendre, dans les prochains jours, le discours défendant «la dignité des membres du gouvernement qui doivent bénéficier des bonnes conditions de travail». Tout cela pour justifier les sorties inconsidérées des fonds publics à des fins individuelles. Les députés n’ont-ils pas donné le ton en exigeant la construction d’un nouvel immeuble moderne pour le Parlement ?

ADMINISTRATION : LE PILIER DU GOUVERNEMENT

Les observateurs avertis de la politique congolaise sont dramatiquement surpris d’apprendre que l’objectif de l’éléphantesque gouvernement Gizenga est «de voir tous les secteurs importansts de la vie nationale bénéficier de l’attention politique nécessaire et au plus haut niveau». C’est le lieu de rappeler que si les précédents gouvernements ont échoué dans leurs actions, c’est tout simplement parce qu’ils ont fonctionné sans une «Administration efficace et efficiente».

Ainsi, les ministères ont tenté sans succès de se substituer en Administration. Tout se concevait et se traitait au niveau des ministères avec des conseillers sortant du néant, souvent des copains ou des membres de famille n’ayant aucune maîtrise des dossiers. Ils étaient là pour des raisons faciles à deviner. Ce qui explique tous ces fatras de dossiers mal ficelés. Conséquence : dans des conférences internationales, les délégations congolaises ont souvent fait piètre figure pour la bonne raison que les véritables experts du secrétariat général (Administration) n’ont jamais été associés étroitement à l’élaboration de différentes initiatives. Ils ont toujours été des oubliés, des laissés-pour-compte. Après le gâchis, l’expérience de l’Administration marginalisée n’a plus de place en RDC.

Bref, contrairement aux assertions du Premier ministre, telles que livrées par son porte-parole, tous les secteurs importants de la vie nationale sont connus et doivent «bénéficier de l’attention politique nécessaire et au plus haut niveau». Tel n’a jamais été le cas, à cause du contexte politique de l’époque. Pourtant, Antoine Gizenga a promis, au lendemain de sa nomination en qualité de Premier ministre, de réhabiliter l’Administration publique. Il pense trouver là le sésame pour rendre son futur gouvernement efficace. Mais que cela conduise à la création des multiples ministères aux contours flous, sans répondants au sein de l’Administration publique, à tous les échelons jusqu’en provinces, la porte serait grandement ouverte à la gabegie. A l’irrationnel. A moins que l’opération ne serve qu’à recruter les militants politiques. Mais le coût financier sera de plus élevé.

DONNER DES SIGNAUX CLAIRS

En plus, on sait que les ministres et leurs armées de conseillers ne font pas le gros du travail attendu. Etant politique, le ministre oriente, à son niveau, la politique gouvernementale. Pour cela, il s’appuie sur les services administratifs. D’où, l’importance d’une Administration motivée s’avère indispensable pour qu’elle demeure, comme sous d’autres cieux, le pilier de tout gouvernement. Gizenga ferait œuvre utile en s’inscrivant dans cette logique.

Au lieu d’éclater les ministères traditionnels pour des raisons qui ne tiennent pas à la rationalité, le mieux consisterait à regrouper certains départements créés abusivement durant la dernière transition. Tel est le cas des ministères des Affaires sociales et humanitaires qui peuvent constituer une seule entité. Il en est de même du ministère de l’Enseignement supérieur et universitaire qui pourrait se fondre avec celui de la Recherche scientifique.

On peut multiplier des suggestions pour affirmer qu’il est bien possible de faire de bonnes choses avec une poignée d’hommes compétents, éprouvés surtout, sans recourir à la formule d’un gouvernement éléphantesque. Cela vaut également dans le cas d’un gouvernement dit de coalition. Il est contreproductif d’hypothéquer la matérialisation des «chantiers» annoncés en privilégiant les politiciens jouisseurs.

L’essentiel, pour Gizenga, est de donner des signaux clairs de bonne gestion des pressions politiques, dans le strict respect des principes généraux de la bonne gouvernance, sans verser dans des considérations politiciennes. Dans le cas contraire, comme il vient d’en manifester la volonté, il aura déçu comme ses prédécesseurs. L’après-élections sera égal à l’avant-élections. Ce qui ne rassure personne, ni au pays ni à l’étranger.

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